L’école béninoise est-elle trop chère ?

Publié le par Vitalp

Alors que les parents d’élèves ploient sous les dépenses scolaires qui se multiplient, les administrations des établissements aussi se plaignent que sans les moyens, l’éducation de qualité n’est pas possible. La question du coût de plus en plus élevé de l’enseignement privé et public demeure un défi sûr pour tous.
Abbés Symon Déodate Gnacadja, Angelo Abodé, Stagiaires


« Mes trois enfants sont au collège privé. La scolarité des deux premiers me revient à près de 150.000 frs. Ils ont, les deux, passé sans succès le Bepc cette année. Cela me fait de la peine, à recommencer les mêmes dépenses. Je me prive de tout pour honorer leur frais d’écolage. Il reste même pour le dernier que je n’ai pas encore soldé. Je voudrais les ramener cette rentrée au cours public, mais j’hésite car je suis embarrassée. Quelle école choisir ? Je  reste très découragée des résultats» soupire  Chantal, la quarantaine, visiblement dépassée par les charges liées à la scolarisation de ses enfants. Tout comme cette mère de famille, que de parents d’élèves se plaignent des dépenses engagées durant une année scolaire! Et c’est toujours avec crainte et grande appréhension qu’ils vivent les derniers jours des vacances de leurs enfants.
C’est connu, la liste de fournitures largement diffusées par voie de presse à l’approche de chaque rentrée. Et à cette liste officielle il faut ajouter d’autres ouvrages selon le programme et la vision de certains collèges privés pour la plupart. On connaît aussi la liste de certaines rubriques de dépenses comme les frais de photocopie, les frais de bibliothèques, les frais de TD (Travaux dirigés), les frais de ciment et parfois même des briques. La liste n’est pas exhaustive. Elle varie d’ailleurs d’une école à l’autre. Et que dire des dépenses qui ne sont pas prises en charge par l’établissement.  Dans ce volet on retrouve les uniformes, les répétiteurs, les frais de déplacements.
Certains parents sont capables d’avancer des chiffres pour les dépenses engagées pour la scolarité de leurs enfants. «La fin de l’année, un enfant           inscrit au collège me revient à un million» nous confie Sangnidjo. Rémi, à quelques jours de la rentrée, ne cesse de ruminer les charges qu’il a supportées pour ces enfants inscrits dans un collège privé de Calavi l’année dernière. «Les trois enfants m’ont coûté l’année écoulée 1.500.000 francs» lance-t-il les yeux hagards. Et comme ses affaires ne prospèrent plus comme avant, Rémi  scrute l’avenir avec désespoir car pour lui, les frais de scolarité  sont excessifs. On en déduit avec Bruno Honagbodé, professeur d’Allemand au Cours secondaire Notre-Dame des Apôtres que l’école, aujourd’hui, est chère et ne peut jamais être gratuite.
Mais les administrations, des établissements ne tarissent pas d’explications à la panoplie de dépenses qui fait gémir les parents. La stratégie défensive, dans les structures de l’enseignement privé, a pour base le souci d’offrir la meilleure  éducation aux élèves. Pour ce faire, nous rassure-t-on, la classe professorale serait constituée de la fine pointe de l’élite intellectuelle et donnerait lieu à un  recrutement des plus coûteux. Selon la directrice du Collège Notre-Dame des Apôtres, le salaire des enseignants seuls ferait les trois quarts de tout le budget annuel. L’impôt perçu par l’Etat ne rend pas non plus la tâche facile au point où certains promoteurs d’écoles pensent que l’Etat s’enrichit sur le dos des parents d’élèves à travers les écoles privées. Soit. Il faut reconnaître tout de même des exagérations dans la création des charges au niveau de bien d’écoles privées. C’est le cas des uniformes obligatoires. «J’aurais pu coudre trois fois moins cher l’informe que l’école a vendu a ma fille» se plaint Evelyne, cette vendeuse de divers au marché Dantokpa dont la fille a fréquenté l’année dernière un collège privé. Et ce n’est pas tout, dans un collège privé de Calavi, il est même exigé aux élèves des chaussures qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses. 
En réalité il est difficile de maîtriser les dépenses réelles engagées par les parents d’élèves pendant l’année scolaire. Le phénomène de chômage aidant, plusieurs citoyens ont embrassé la carrière d’enseignant pour se faire d’argent. Et pour ce faire, ils usent de tous les artifices au détriment des parents. Sinon comment comprendre qu’au mois de mars déjà certaines écoles privées arguant du manque d’argent arrêtent les cours? Alors que le fondé coule douce avec la fortune qu’il a constituée sur le dos des parents à travers les frais divers créés durant les quelques mois de travail.
L’école publique sans doute est à l’abri de l’interruption des cours en pleine année scolaire sauf en cas de grève. Mieux, le gouvernement rendant gratuit le primaire a officiellement publié pour le compte de la rentrée du 1er octobre 2009 les taux de contributions scolaires qui varient entre 6.000 et 10.000  francs dans les collèges d’un département à un autre. Mais la réalité est tout autre. Certains frais (infirmerie, bibliothèque.) sont presque fixes. Mais bien d’autres frais difficilement maîtrisables comme les houes, balaies, coupe-coupe, râteau, ciment, les photocopies viennent se greffer à la scolarité pour la porter parfois à plus de 100.000 francs. «Je ne comprends plus rien. Les frais de photocopie seuls ont fait près de trois fois les frais d’écolage que j’ai payé pour mon enfant au collège Sègbèya» lance Fanou l’air révolté. Et quand il ajoute les frais de répétiteur, il se retrouve à plus de 200.000 francs. Dans les écoles publiques la gratuité décrétée par le pouvoir a entraîné les enseignants à développer une approche qui revient plus chère aux parents qu’ils ne payaient. Les cours de renforcement érigés en règle pèsent lourdement sur les parents qui se voient parfois obligés de débourser plus de 50.000 francs pour un écolier de CM2.
L’approche purement com-merciale qui se développe chaque rentrée complique la scolarisation qui devient de plus en plus chère. Seulement le problème n’est pas de constater que l’école béninoise coûte cher. Mais il est surtout difficile aux parents d’élèves de maîtriser toutes les causes de la cherté de la scolarisation de leurs enfants.
Encadré

Les taux de contributions scolaires

• Pour les élèves Béninois

- Département de l’Atlantique/Littoral :..................... 10.000 Francs

- Département de l’Ouémé/Plateau :............................. 9.000 Francs

- Département du Zou/Collines :................................... 8.200 Francs

- Département du Mono/Couffo :................................. 8.000 Francs

- Département du Borgou/Alibori :............................... 7.000 Francs

- Département de l’Atacora/Dougou :.......................... 6.000 Francs

• Pour les élèves étrangers

- Premier cycle :.............................................................. 75.000 Francs

- Second cycle :............................................................ 100.000 Francs

Arrêté ministériel n° 0057/Menrs/Cab/Dc/Sp
en date du 25 septembre 1998.


Source: La Croix du BENIN

Publié dans Décryptage

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