Rejet à nouveau du rapport d’activités de Mathurin Nago: Les raisons du vote abstention des 9 députés FCBE

Publié le par Vitalp

Si le rapport d’activités du Président Mathurin Nago a été rejeté une troisième fois jeudi dernier, c’est surtout à cause du vote abstention des 9 députés FCBE et non à cause du vote négatif de 39 députés de l’opposition. Car un vote positif de ces 9 députés, en plus des 33 autres aurait donné une majorité de 42 voix en faveur du rapport. Beaucoup de Béninois se demandent encore les raisons profondes qui ont pu justifier un tel acte de la part de ces 9 députés FCBE. Nous nous sommes rapprochés de certaines personnes de leur entourage immédiat pour en savoir davantage.

Le vote abstention des 9 députés du groupe parlementaire " FCBE Sursaut Patriotique " par rapport au rapport d’activité du Président de l’Assemblée nationale Mathurin Nago a une double explication :

- d’abord pour reprocher au Président Nago sa mauvaise gestion politique du parlement et lui rappeler qu’il dirige une institution de contre pouvoir indépendant du gouvernement

- et ensuite pour donner à nouveau des signaux forts au Président Boni Yayi de ce qu’un malaise vicie l’atmosphère au sein de la mouvance, où certains sont de plus en plus marginalisés, brimés.

Il n’est en effet plus un secret pour personne que les députés, dans leur majorité reprochent à leur Président de faire de leur institution une structure vassale du gouvernement, une caisse de résonance, une caisse d’enregistrement des desiderata du Chef de l’Etat plutôt qu’un véritable Parlement, institution de contre pouvoir. Il est reproché au Président Nago qui a été par le passé ministre d’avoir gardé comme une espèce de nostalgie du gouvernement, de sorte qu’il continue de se sentir encore dans la peau d’un ministre de Yayi, ce qui fait qu’il se comporte de manière à transformer le Parlement en un département ministériel supplémentaire, c’est-à-dire une institution aux ordres du Président de la République. Cela, les députés de l’opposition l’ont déjà dénoncé plusieurs fois, en privé et surtout publiquement. Jusque-là, certains députés de la mouvance qui pensent la même chose que leurs collègues opposants le disaient sous cape, en privé. Ils n’avaient jamais osé le dire en publique. Ils essayaient de gérer leurs frustrations, dans l’espoir que les choses s’amélioreraient au sein de leur famille politique. Mais les choses s’empirant au lieu de s’améliorer, ils ont décidé maintenant, non pas de parler (cela viendra peut-être), mais de réagir, publiquement et non plus seulement en privé. En somme, les 9 députés de la mouvance qui ont voté abstention sont d’accord avec leurs collègues de l’opposition pour dire qu’il faut que le Président Nago arrête de donner l’impression de recevoir des instructions du Palais de la Présidence de la République quant à la manière dont il doit gérer le Parlement, qu’il fasse un peu plus d’effort d’être le Président de tous les députés, le Président des représentants du peuple et non le Président des " députés vassaux et courtisans " du Chef de l’Etat. Là, c’est pour la première série de raisons du vote.

Sur un autre plan, la seconde série de raisons qui motivent ce vote abstention, c’est le fait que beaucoup de députés de la mouvance se sentent en insécurité pour leur vie et leur avenir politiques. Beaucoup sont mécontents. Ils sont en réalité plus de 9 à être mécontents au sein de la mouvance parlementaire. Seulement, ils sont 9 pour l’instant à avoir le courage de s’arrêter de se taire, à avoir le courage de dire non aux brimades, à avoir le courage d’exprimer tout haut ce que la grande majorité des députés FCBE pensent tout bas. Cela veut-il dire que d’autres collègues mouvanciers leur emboîteront le pas dans les jours à venir ? On attend de voir.

A visage découvert maintenant
Ce qui est sûr, c’est que ces 9 députés du groupe parlementaire " FCBE Sursaut Patriotique " veulent prendre les choses en main pour ne plus avaler des couleuvres et prendre leurs précautions pour leur vie politique. De quoi s’agit-il en fait ?
Contrairement à ce qui se fait normalement en politique partout ailleurs, à ce qui se faisait même sous Kérékou où lorsqu’un homme politique proche du pouvoir est influent dans son milieu, le pouvoir l’aide à être davantage fort en soutenant, pour qu’en retour il continue de maîtriser le terrain et draine davantage d’électeurs et de sympathisant au profit de la mouvance au pouvoir, sous l’ère du changement, certains députés leaders politiques de certaines localités ont comme l’impression que plus on constate qu’ils sont bien assis politiquement dans leur fief, plus on cherche à les affaiblir, plus on cherche à les détruire en finançant leur rivaux politiques (de la même famille politique) sur le terrain. Au lieu de leur donner les moyens pour travailler, on donne des moyens à d’autres personnes que eux autres qui les combattent sur le terrain. Lorsqu’il y a à faire les listes de candidats aux élections, on tient moins compte de leur avis, et on va concocter les listes avec des gens qui n’ont aucune assise politique sur le terrain et on s’arrange pour faire valider cela par le Chef et on l’impose à tout le monde. Autrement dit, si les choses avaient été faites correctement, FCBE aurait peut-être eu plus de conseillers communaux et de village qu’il y en a actuellement. Il n’est en effet un secret pour personne que la confection des listes de candidats aux élections législatives de 2007 et communales de 2008 a fait beaucoup de mécontents dans la famille FCBE. Même Adam Boni Tessi, un député FCBE encore fidèle à Yayi l’a dit hier sur le plateau de l’émission Zone Franche de Canal 3. Pour lui, il faudra tenir compte du terrain pour les prochains positionnements électoraux.

Gérer les intérêts
Des députés FCBE constatent aujourd’hui qu’on veut les détruire sur le terrain en donnant des moyens à ceux qui ont toujours voulu ravir leur place et qui, selon eux ne maîtriseraient pas le terrain autant qu’eux. Quelques exemples.
Le député Yahouédéhou ne doit certainement pas voir d’un bon œil que lui le député et l’ancien candidat à l’élection présidentiel qui a quand même montré ce qu’il pèse soit aujourd’hui relégué aux oubliettes au profit du ministre Dovonou (qui soit dit en passant commencera aussi sa descente aux enfers très bientôt, apprend on). Que deviendra-il lui, Yahouédéhou, à cette allure ? Va-t-il se laisser faire ?

Le député Aho ne doit pas voir d’un bon œil que plus de moyens soit donné au député Kindjanhoundé, un transfuge de la RB, qui passe aujourd’hui pour le plus partisan de Yayi dans le Zou. Que deviendra-il lui, Aho, à cette allure ? Va-t-il se laisser faire ?

Le député Samou Adambi ne doit pas aimer le fait que ce soit son adversaire politique juré Rachidi Gbadamassi qui soit aujourd’hui l’enfant chouchou de la mouvance qui a les moyens de travailler sur le terrain. Que deviendra-il lui, Adambi, à cette allure ? Va-t-il se laisser faire ?

Le député Edgar Alia voit-il d’un bon œil que ce soit le ministre Désiré Adadja qui ait les moyens d’être coordonnateur départemental FCBE des Collines, alors que lui le député est là depuis des années et des années, travaillant pour la mouvance ? La preuve, pour les dernières communales, il a dû faire à part sa liste lorsque ses gens à lui, très assis sur le terrain, ont été écartés de la liste FCBE. Et les résultats des communales ont édifié tout le monde. Sur le terrain aujourd’hui, il se sent mis en difficulté par sa propre famille politique. Que deviendra-il lui, Alia, à cette allure ? Va-t-il se laisser faire ?

Le député André Dassoundo ne voit certainement pas d’un bon œil que ce soit le ministre Nicaise Fagnon qui n’a jamais été élu (alors que lui Dassoundo est un député réélu) qui soit celui qui passe le plus pour le défenseur des intérêts du Chef de l’Etat ; pour ne pas en dire plus… On sait que cela ne va pas fort entre eux deux : rivalités. L’un a les moyens d’action ; l’autre se sent brimé. Que deviendra-il lui, Dassoundo, à cette allure ? Va-t-il se laisser faire ?

Le député Luc da Matha Santana est lui aussi délaissé au profit d’autres mouvanciers dans le département de l’Atlantique. On se rappelle même que le député Luc da Matha Santana a failli perdre son immunité parlementaire (sur demande du Chef de l’Etat) pour aller devant la Haute Cour de Justice. Que deviendra-il lui, Luc da Matha Santana, à cette allure ? Va-t-il se laisser faire ?

Pour ne citer que ces cas-là….
C’est donc pour lancer un signal fort au Chef de la mouvance que ces 9 députés ont ainsi voté.
Il revient donc au Chef de l’Etat de savoir comment gérer les intérêts au sein de la famille FCBE. Car il nous revient que ce sont tous des gens qui continuent de nourrir le désir de travailler avec le Président Yayi. La preuve : eux tous ont travaillé à son élection en 2006. Seulement, ils se sentent mis à mal. Leurs intérêts du moment et de demain sont mis à mal. Or on ne rassemble des hommes qu’autour de leurs intérêts, ceci au-delà de l’intérêt général que tout le monde dit défendre. Car si Yayi veut se faire réélire en 2011, ceux qui sont avec lui aussi veulent se faire réélire députés ou maire ou autre.

Un homme prévenu en vaut deux. Sinon il y à le risque d’un vote pas en faveur du budget de l’Etat exercice 2010. Des députés FCBE grognent déjà : ils ne sont associés à rien ; et après on leur dira de voter le budget, comme si on leur donnait des instructions. Cette fois-ci, cela va être difficile. Il y à donc un risque que le Chef de l’Etat soit obligé de prendre une ordonnance pour mettre en application son budget exercice 2010. Légalement, ce sera permis pour lui. Mais politiquement, ce sera un élément supplémentaire pour éroder davantage sa popularité déjà mise à mal. A lui de voir…

Brice HOUSSOU
Journal FRATERNITE 16/11/09

Publié dans Politiques

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