Interpellation du Chef de l’Etat au sujet des dérives du ministre Fagnon : Les députés toujours inquiets exigent des excuses publiques de Boni Yayi

Publié le par Vitalp

Au nom du chef de l’Etat, le ministre d’Etat Koupaki a délégué le ministre Baba Body pour porter la réponse du président devant l’Assemblée nationale au sujet de l’interpellation des députés suite aux propos tenus par le ministre Fagnon. Après avoir fait le constat que le représentant du Chef de l’Etat n’a pas rejeté leurs allégations, Adrien Houngbédji et les siens ont vu, à travers l’absence du Chef de l’Etat, une fuite de responsabilité.

« Lorsque le Christ est conduit devant  Pilate, il a décliné  toute responsabilité. Au nom du chef de l’Etat, le ministre Baba Body dit que son collègue Fagnon ne peut pas être sanctionné parce qu’il était en réuni­on politique…on n’est pas chef de l’Etat pour fermer les yeux sur les erreurs… la façon de bouter en touche du chef de l’Etat ne saurait nous convaincre. Il est garant de la constitution, sa responsabilité est engagée. Mais je voulais donner acte  au chef de l’Etat qui n’a pas contesté nos allégations » a répliqué Me Adrien Houngbédji, auteur principal de l’interpellation du président Boni Yayi après les déclarations de son ministre des transports à Dassa. Ce constat  de Houngbédji a été soutenu et, au besoin, approfondi par certains députés G et F et même Fcbe. Dans sa réponse, le chef de l’Etat a écarté l’hypothèse de l’implication directe dans une telle dérive verbale en s’appuyant sur les articles 71 et 113 de la constitution et 113 du règlement intérieur. «  Je me dois de dire que l’interpellation qui m’est adressée ne s’inscrit pas dans le cadre tracé par notre loi fondamentale dont je suis le garant et que j’ai la charge de faire respecter ». «  Comme vous l’aviez si bien dit dans votre interpellation, monsieur Fagnon, ce jour là du 02 mai 2009, était en réuni­on politique, revêtu de tee-shirt aux couleurs de son parti politique, ce qui traduit bien qu’il n’agissait pas en tant que ministre mais en tant que militant d’une alliance de partis politiques » a renchéri  le chef de l’Etat lu par le ministre Baba Body. C’est cette portion de phrase qui a retenu l’attention des députés de l’opposition. Parce que nulle part dans la réponse du chef de l’Etat, les allégations du député Houngbédji et ses 14 autres collègues dont les présidents Rosine Soglo, Bruno Amoussou, Idji Kolawolé n’ont pas été réfutées. Les députés sont unanimes, en dehors de quelques voix discordantes du coté de la mouvance, à reconnaître la véracité des faits et actes reprochés au ministre Fagnon. Les députés Amoussou, Rosine Soglo, Idji Kolawolé, Eric Houndété, Georges Bada etc  ont  déploré l’absence du chef de l’Etat qui, ce faisant, n’a certes pas violé la constitution mais n’a pas considéré l’auguste Assemblée. Mieux, il n’a pas pris, selon les députés cités, les actes de son ministre, fut-il un militant cauris, au sérieux en dépit de leur gravité. C’est pour cette raison que la présidente de la Renaissance du Bénin a invité le président Yayi à monter à nouveau au créneau pour rassurer les Béninois. « Yayi est le garant de la constitution. Je veux qu’il monte au créneau pour nous rassurer, nous donner sa parole et nous dire que la paix sera garantie ». Le président Amoussou abonde dans le même sens et dit qu’il aurait  été très satisfait de voir le président Yayi à l’Assemblée, même si la loi ne l’y oblige pas. Cependant il a déploré que le chef de l’Etat affiche une attitude de fuite  de responsabilité. Pour Rosine Soglo,  Fikara et Idji, c’était l’occasion pour le chef de l’Etat de démentir de façon solennelle les propos gênants qu’on l’accuse de tenir lors de ses descentes sur le terrain en campagne comme en visite.  Ceci off record. Les députés Fcbe n’ont pas pu contredire leur vis-à-vis à propos des faits reprochés au ministre non plus.  Pour le député Bio Kansi, «  la bouche de l’homme est plus qu’un kalachnikov. Je suis désormais tranquille et je souhaite que nous continuions dans ce sens… pour  enlever la gangrène ». Pour son collègue Justin Yoto Sagui, à quelque chose malheur est bon. C’est une occasion pour que chacun éduque ses militants. Mais le député Débourou, tout en banalisant la question sur le tapis, s’en est d’abord pris aux auteurs de l’interpellation avant de conclure que Fagnon est libre de dire ce qu’il pense car il n’a pas prêté serment. La présence des présidents Houngbédji et Amoussou a été saluée par le député Ahinnou car elle a, selon lui, induit  l’ambiance modérée vécue hier au parlement. Sans leur apport, il s’imaginait le pire.

Tobi Ahlonsou
Journal LA PRESSE DU JOUR  01/07/09

Réponse du Président de la République,  Chef de l’Etat, chef du Gouvernement à l’interpellation  de l’Assemblée Nationale Objet de la Décision 2009-017/PT/AN

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,
Honorables députés,
Le 02 juin 2009, l’Assemblée  nationale, en application des dispositions des articles 71 et 113 de la Constitution du 11 décembre 1990 et 113 de son règlement intérieur, a accueilli favorablement la demande d’interpellation du président de la République, chef du Gouvernement, formulée par un certain nombre de députés au motif que des menaces pèseraient sur les libertés et l’unité nationale.

Au soutien de cette décision, il est allégué que Monsieur Nicaise Fagnon, membre du gouvernement, aurait déclaré lors d’une manifestation politique à Dassa-Zoumé le 02 mai 2009, qu’il s’opposerait au « pluralisme politique dans sa région » d’origine puis aurait « mis en garde toute personne qui ferait un autre choix politique que le sein et se hasarderait à venir l’exprimer à Dassa voire dans le département des Collines ».

Décryptant ces propos, les députés signataires de la demande d’interpellation en sont arrivés à la conclusion qu’ils s’inscriraient dans une série d’actes qu’aurait posées le gouvernement du Président Boni Yayi et sui mettraient en péril les acquis démocratiques de la République du Bénin.
Au nombre de ces actes, je retiens entre autres :

. « La prise d’arrêtés préfectoraux d’interdiction de réuni­ons publiques dans l’Atacora/Donga et l’Alibori/Borgou, alors que dans le même temps, les ténors du régimes y organisent des rassemblement, intoxiquent et corrompent les populations » ;

. « Le refus illégal d’installation des conseils communaux aussi longtemps que la formation politique du chef de l’Etat, Fcbe, n’y détiendrait pas la majorité, assorti de violence faite aux populations » ;

Ils en déduire que la responsabilité du Président de la République serait « largement engagée ».

Si les faits ci-dessus relatés ont retenu l’attention, leur imputation au chef de l’Etat au point de l’interpeller devant la Représentation nationale ne s’explique pas. C’est pourquoi, il me paraît opportun de les prendre pour ce qu’ils sont et de les situer juste valeur.

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,
Honorables députés,
Je me dois de dire que l’interpellation qui m’est adressée ne s’inscrit pas dans le cadre tracé par notre loi fondamentale dont je suis le garant et que j’ai la charge de faire respecter.
En effet, l’interpellation qui est une demande d’explication adressée par des parlementaires au gouvernement sur sa politique générale ou sur une question déterminée est prévue par les articles 71 et 113 de la constitution ainsi que par l’article 113 du règlement intérieur de La l’Assemblée Nationale en ces termes : « Le président de la République ou tout membre de son gouvernement peut, dans l’exercice de ses fonctions gouvernementales, être interpellé par l’Assemblée Nationale… ».

Il importe donc de préciser qu’en application des dispositions de l’article 71 ci-dessus cité, l’acte du chef de l’Etat ou d’un membre du gouvernement qui peut donner lieu à interpellation par la représentation nationale, est celui posé dans le cadre des fonctions gouvernementales.

Or, comme vous l’avez si bien dit dans votre interpellation, Monsieur Nicaise Fagnon, ce jour là du 02 mai 2009, était en réuni­on politique, revêtu de tee-shirt aux couleurs de son parti politique, ce qui traduit bien qu’il n’agissait pas en tant que Ministre mais en tant que militant d’une alliance de partis politiques.

Je ne saurais donc légalement être interpellé au sens de l’article 71 de notre Constitution pour une activité qui ne s’inscrit pas dans le cadre de la fonction gouvernementale.
Je puis néanmoins vous assurer que je reste profondément attaché aux valeurs cardinales d’un Etat de droit caractérisé par le respect des droit fondamentaux de l’homme, des libertés publiques et de la justice y compris la libre circulation des personnes, des biens et des services sur l’ensemble du territoire de notre République.

Au-delà des divergences d’approches politique, de croyance, de projet de société, il y a quelques chose de plus grand et de plus noble qui transcende tous les clivages et les générations et que je me dois, en ma qualité de chef de l’Etat de préserver et de sauvegarder : c’est la République du Bénin pérenne et indivisible.

Par ailleurs, au nombre des actes d’intolérance et de violence des libertés sur lesquels votre augustes Assemblée m’a interpellé, vous évoquiez ”la prise d’arrêtés préfectoraux d’interdiction de réuni­on publiques dans l’Atacora-Donga, l’imposition dans plusieurs communes, au cours des dernières élections municipales, communales et locales, d’une liste unique Fcbe, arrachant ainsi aux populations leur droit à choisir librement leurs dirigeants”.

Vous conviendrez avec moi que l’autorisation des manifestations publiques relève au Bénin comme ailleurs dans tout pays démocratique, de la police administrative.

L’autorité administrative, en l’espèce le préfet du département, doit s’assurer avant d’accéder à toute requête à manifester en un lieu public que les conditions sécuritaires pour éviter des troubles majeurs à l’ordre public sont réunies.

A défaut, elle est fondée à prendre des dispositions appropriées qui parfois donnent lieu à des restrictions parfaitement légales.

Si tel était le cas, je ne saurais, en ma qualité de Président de la République, en répondre au point de mériter une interpellation parlementaire contraire à l’esprit et à la lettre de l’article 71 de la constitution béninoise du 11 décembre 1990.

En tout état de cause, tout citoyen a la latitude, dans un Etat de droit comme le nôtre, de saisir le juge garant des libertés publiques pour faire valoir ses droits.

Enfin, au sujet du refus présumé de l’installation des conseilles communaux, je ne comprends toujours pas que ceux qui contestaient la non installation des conseils communaux n’aient pas en son temps saisi le juge administratif pour dire le droit en la circonstance.

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale ;
Honorables députés,
Soyez rassurés que je suis parfaitement conscient de ma haute charge.
Les béninois veulent des idées fortes sur la manière de conduire leur pays à des lendemains meilleurs.

Je salue la détermination de l’ensemble des parlementaires à jouer le rôle qui leur est dévolu par la Constitution de notre pays.

La présente interpellation est la preuve de la vitalité de notre jeune démocratie et de l’expression de la volonté de ses acteurs politiques à contribuer par le dialogue et la veille citoyenne à prévenir toute situation préjudiciable à la paix et à l’uni­on nationale.

Je n’ai qu’un seul objectif, celui de faire du Bénin une nation unie, paisible et prospère avec le concours de l’ensemble des forces vives qui acceptent de partager avec notre peuple, les valeurs éthiques, le sens du bien public, la discipline, le travail bien fait, le respect de l’Autorité de l’Etat et de se soumettre à l’obligation de résultat et de reddition de comptes.

Je sais pouvoir compter sur vous pour garantir à notre pays un meilleur fonctionnement des institutions de notre République et je vous prie de croire, Monsieur le Président et Honorables Députés, l’assurance de ma fraternelle et distinguée considération.

Cotonou, le 16 juin 2009

Président de la République,
Chef de l’Etat,
Chef du Gouvernement,
Dr Boni Yayi.

Quelques réactions des députés

Me Adrien Houngbédji, président Prd
« Tous les intervenants qui m’ont précédé ont situé d’emblée le débat…Ce dont il s’agit aujourd’hui, c’est la paix dans notre pays, c’est l’unité de notre pays, c’est la volonté que nous avons toujours affirmée que tous les Béninois se sentent partout chez eux sur toute l’étendue du territoire national. Ce dont il est question aujourd’hui, c’est la défense des libertés publiques que nous avons chèrement acquises. Et comme le dit la publicité de la pile Wonder, la liberté ne s’use que  si l’on s’en sert. Nous sommes préoccupés, la population est préoccupée. Et c’est parce que nous sommes préoccupés que nous avons déposé cette interpellation. J’ai écouté avec l’intérêt que vous imaginez la réponse du Chef de l’Etat par l’intermédiaire du ministre en charge des relations avec les institutions. En l’écoutant, c’est à l’une de ces scènes bibliques que j’ai pensé. Lorsque le Christ a été conduit devant Ponce Pilate, ce dernier s’est lavé les mains et a décliné toute responsabilité dans ce qui était en train d’arriver alors qu’il était de son devoir, de sa compétence et de son autorité d’y mettre fin. Le ministre Baba Body a dit tout à l’heure au nom du Chef de l’Etat que ce n’est pas de la responsabilité du président de la République de sanctionner les agissements d’un ministre qui est en réuni­on politique. Et poursuivant son discours, il a dit que lorsque les préfets interdisent les réuni­ons publiques, cela n’est pas de la responsabilité du Chef de l’Etat. Lorsque, au nom d’une logique que nous n’arrivons toujours pas à comprendre, il est refusé à des élus locaux de s’installer alors que la loi dit qu’une fois que leur élection est proclamée par la Cena, on doit les installer avant toute contestation, avant tout contentieux et que face à tout ceci, le Chef de l’Etat dégage sa responsabilité, je voudrais savoir à quel moment sa responsabilité peut-elle être engagée. On n’est pas Chef d’Etat pour faire les yeux, fermer les oreilles et fermer la bouche comme l’allégorie du singe qui ne veut rien dire, rien entendre et rien voir et laisser agir des personnes que l’on a nommées par décret en conseil des ministres. Comme l’a dit tout à l’heure Mme Rosine V. Soglo, nous sommes préoccupés et nous ne voulons pas que dans notre pays, on voie s’installer des «radios milles Collines». Nous ne voulons pas voire des Béninois et des Béninoises se battrent à coup de machettes, à coup de gourdin. Nous avons fait des élections dans ce pays pendant plusieurs années depuis la conférence nationale. Les vainqueurs comme les vaincus se sont inclinés. Il n’y a pas eu de violence. Et c’est ce climat  qui nous voue le respect, l’admiration de la communauté internationale toute entière. Nous voulons que ce respect soit sauvegardé. Nous voulons que la paix dans notre pays soit sauvegardée. Par conséquent, Monsieur le ministre, je vous prie de dire au Chef de l’Etat que sa façon de botter en touche ne saurait nous convaincre. Il est garant du respect des lois de la république. Il est garant du respect des libertés. Il est garant des valeurs de la République. Ce qui a été fait et dit par le ministre Fagnon engage totalement sa responsabilité. Je voudrais donner acte au ministre parlant au nom du Chef de l’Etat qu’à aucun moment, il n’a contesté la véracité des propos tenus par le ministre Nicaise Fagnon…Il a reconnu que son ministre a tenus de tels propos. Il a reconnu que son ministre a eu de tels comportements. Alors, là où il y a faille, la paix et la liberté étant menacées, l’unité du pays étant menacée, l’ethnicité reprenant le dessus du débat politique, le Chef de l’Etat a failli parce que c’est de son devoir de rappeler publiquement son ministre à l’ordre et de présenter des excuses au peuple… »

Rosine V. Soglo, présidente RB
« Je suis à la fois navrée et désolée de l’attitude qu’a eu le président de la  République. Mais il est dans son rôle. C’est de bonne guerre. Je suppose même que ce soit un simple citoyen qui ameute la population pour dire dans rue moi je suis ceci et cela…C’est la responsabilité du Chef de l’Etat à travers la police qui est engagée pour mettre fin à la dérive. Ce qui me chagrine et qui surtout m’incite à la prudence et m’inquiète, c’est aussi certains propos du Chef de l’Etat lui-même quand il s’en va dire un peu partout, hors micro soi-disant, les fons ont fait ceci, les fons ont cela, les fons ont déporté les nagots…Je suis nagot de père et mahi de mère. Ma famille Gbaguidi se trouve encore en esclavage ? Non. Ça s’est passé il y a dix siècles. C’est aujourd’hui que nous allons reprendre la guerre d’il y a 17 ans ? Qu’est-ce que je vais dire moi, moi Rosine Soglo de mère mahi et de père nagot ayant épousé un fon et ayant mis des fons au monde ? Je crois que, même si Nicaise Fagnon n’est pas ministre, le Chef de l’Etat devrait le rappeler à l’ordre. Je voudrais alors demander au Chef de l’Etat dans ses prérogatives de garant de l’unité nationale de tirer les oreilles à son ministre, de lui dire qu’il ne peut pas dire des choses du genre. Il faut qu’il dise par ailleurs qu’il ne l’a pas envoyé dire ça… Nous voulons que le Chef de l’Etat monte au créneau pour dire que la sécurité est garantie, je vous donne ma parole et ainsi, moi en tant que pauvre femme, je pourrai dormir tranquille…»

Bruno Amoussou, président du Psd
« Nous avons adressé une interpellation au Chef de l’Etat sur le sujet que mes collègues viennent de rappeler. Et dans nos textes, il est dit que le président de la République, pour répondre, peut venir en personne, il peut déléguer un ministre à cet effet pour venir répondre. Naturellement que nous aurions été très satisfait de le voir lui-même et on aurait été ravi de dire que le sujet que nous avons évoqués, les problèmes que nous avons abordés lui paraissent importants à tel point qu’il est venu lui-même. La loi ne l’oblige pas à venir. Mais il a délégué son pouvoir au ministre d’Etat qui assure son intérim. Celui-ci délègue à son tour ce pouvoir au ministre chargé des relations avec les institutions. La loi peut ne pas régir quelque chose mais c’est quand même mieux de faire les choses de façon conviviale. Je remercie le ministre qui a parlé au nom de lui-même et au nom du Chef de l’Etat…Je suis tout de même embarrassé du fait qu’il n’y a pas eu une appréciation des propos tenus par le ministre Fagnon. Je considère que si un citoyen dit ce qui a été dit et qu’on incrimine, il nous appartient à nous tous, nous qui sommes d’abord dans cette salle de déplorer au minimum cela. Je m’attendais à ce que le Chef de l’Etat apprécie ces propos tenus par le ministre Fagnon pour dire qu’ils ne contribuent pas à renforcer l’unité nationale sans qu’on soit obligé de l’interpeller si même on doit considéré que le ministre était dans la peau d’un simple citoyen. Il aurait donc été bon que le Chef de l’Etat apprécie ces propos et dise à sa population qu’il désavoue cela pour que personne d’autre ne se livre à cette dérive. Parce que de son autorité, en se prononçant sur ce qui a été dit, il va décourager de tels comportements dans le pays. Ce qui m’a particulièrement gêné dans la réponse du Chef de l’Etat, c’est le fait qu’il n’y ait pas une condamnation des propos du ministre Fagnon. Je ne suis pas rassuré de ce que ça ne va pas recommencer. Je ne suis pas rassuré de ce qu’un citoyen ne va pas emboîter le pas au ministre Fagnon.  Je ne suis pas rassuré qu’un député ou un ministre ne va pas recommencer puisque le Chef, notre Chef à nous tous n’a pas dit que c’est mauvais. Je souhaite vivement qu’en d’autres circonstances, le Chef de l’Etat se prononce sur cette question-là. On lui prête beaucoup de propos. Ce que l’on rapporte qu’il a dit, la meilleure façon de démentir, ce n’est pas que ses partisans disent qu’il n’a pas dit. Mais c’est de nous faire entendre ce qu’il a dit. En laissant dans l’ombre tout ça là, on accrédite tout ce qui se rapporte sur lui. Et en ne condamnant pas  les propos comme ceux tenus par le ministre Fagnon le 2 mai 2009 à Dassa, vous voyez bien que des associations malveillantes peuvent traverser l’esprit de certains…je voudrais personnellement que le Chef de l’Etat, ou chacun d’entre nous trouve un moyen de dire qu’il n’est pas permis de dire ce qui a été dit dans notre pays. Monsieur le président de l’Assemblée Nationale, je souhaiterais que vous-même, vous vous prononciez sur cela…Ce qui nous menace, ce n’est pas trop de centralisme. Non. Ce qui nous menace, c’est la tendance au séparatisme, c’est la tendance aux remerciements identitaires parce qu’on a promu le fils de telle circonscription électorale. Faisons en sorte que rien ne vienne aggraver la situation déjà tendue…  »

Sacca Fikara,  député G 13
« Le résumé de la réponse du président de la République lue par le ministre Baba Body  m’amène à faire deux remarques de forme. Dans sa réponse, il a fait usage du conditionnel. C’est comme s’il mettait en doute ce que le ministre Nicaise Fagnon a dit à Dassa. Or, c’est six fois que l’élément montrant les propos de Fagnon est passé sur la chaîne  de télévision nationale et aussi sur certaines autres chaînes privées. Selon le ministre Baba Body, le président a dit que le ministre Fagnon n’était pas dans l’exercice de ses fonctions quand il a tenu ces propos. Je voudrais demander s’il faut comprendre par là que tous les ministres, tous les jours, du lundi au dimanche qui passent dans les villages pour des réuni­ons administratives et politiques ne sont pas dans l’exercice de leurs fonctions. Ce qui a aussi retenu mon attention est la réponse du président par rapport aux réuni­ons et manifestations qu’interdisent les préfets. Cela fait 20 ans que nous avons renoué avec la démocratie. Est-ce que c’est par hasard sous le président Boni Yayi que tous les partis traditionnels, influents, grands de notre pays n’ont plus de militants dans le Nord parce que pendant les élections communales de 2008 aucun grand parti n’a eu de liste dans le Nord. Est-ce que c’est un hasard ? Est-ce que le ministre Fagnon a dit n’est que le dérivé de ce que nous voyons chaque jour ? Est-ce que les propos tenus par le président de la République en février 2007 à Malanville lors des élections législatives en disant aux populations pourquoi vous voulez voter pour le candidat Saley. Il n’est pas un fils authentique du Nord, c’est un fon sont des propos à banaliser ? Ne pensez-vous pas que l’unité nationale est menacée ainsi ? Je suis inquiet d’autant plus que je sais ce que cela m’a coûté de soutenir Boni Yayi chez moi. En parlant des fons, Boni Yayi parle indirectement des «Ouémès». Je suis inquiet et je suis en colère parce que le président de la république tien des propos qui ne rassure pas. Comme le président a banalisé nos inquiétudes par sa réponse, est-ce que nous sommes autorisés, nous Béninois à aller chacun chez nous dire que plus personne ne viendra parler chez nous d’un autre parti politique ? »

Eric Houndété,  député Force Clé
« Lorsqu’un ministre a arboré le tee shirt de son parti et que par conséquent on ne peut pas dire qu’il n’est pas dans sa fonctions ministériel, cela signifie que je dois comprendre que quand le Chef de l’Etat se déplace et que les gens mettent des tee shirts Fcbe, il ne s’agit plus d’une activité gouvernementale. Conclusion, j’utilise les moyens de l’Etat pour faire de la propagande du parti du Chef de l’Etat. Quelle coloration doit-on donner aux manifestations qui s’organisent tous les samedis lorsque chaque conseiller technique, chaque chargé de ministre, chaque Directeur de sociétés s’improvise représentant du Chef de l’Etat ? Ou il y a tricherie ou on trompe la population. Maintenant, moi je vous met au défi vous les membres du gouvernement de me produire la facture et la preuve de paiement de la couverture médiatique de cette manifestation par l’Ortb si c’est vrai que le ministre Fagnon n’était pas en activité gouvernementale. Car ce jour-là, c’est bien la cellule de communication du ministère et du gouvernement qui ont organisé la couverture de cette manifestation. Lorsqu’on inaugure la cité de l’émergence Fcbe à Lokossa au cours de pose de la première et que les gens viennent en tee shirts, il ne s’agit plus d’une manifestation officielle. De toutes les façons, la cité est déjà immergée et on en parlera plus tard. Pour ma part la réponse du gouvernement n’est qu’une banalisation du parlement et des préoccupations qui ont été évoquées. Le Chef de l’Etat nous envoie un ministre avec la lettre d’un autre ministre. Dans le fond, je pense que le président de la République, lorsqu’il prendra lui-même ce qu’il nous a écrit, devra en tirant la conséquence simple : je démissionne parce qu’il est incapable  d’assumer les fonctions administratives élémentaires qui lui sont confiées. Il est incapable d’être responsable, il se déresponsabilise. Sur des questions simples, un préfet qui prend des décisions qui sont acceptés par lui-même, qui sont vues par lui-même puisqu’il n’a pas su dire que c’est de mauvaises décisions, il nous renvoie à la Chambre administrative de la Cour Suprême. Quand même ! Il y a un minimum qu’il faut assumer lorsqu’on est dans des fonctions comme celles de président de la République. L’argumentaire utilisé est complètement bancal. Lorsque c’est le président de la République et ses partisans qui veulent tenir une, feu vert, mais quand c’est les autres, barrage. Ce n’est pas normal. Et c’est ça ce qui inquiète les Béninois. C’est ça ce qui fait craindre le pire. Non installation des conseils communaux. Là aussi, quand même ! Des exemples sont là hein ! A Calavi, la RB a été spoliée purement et simplement alors que les contentieux n’étaient pas vidés. Ailleurs, on a évoqué le fait que les contentieux ne sont pas vidés pour ne pas installer les conseils communaux. Chacun connaît le cas d’Avrankou, de Sèmè-Kpodji, de Matéri et récemment le cas ridicule de Covè. Parce que la Fcbe ne gagne pas, on a interrompu l’élection du maire. Mais malheureusement tout cela est cautionné par le président de la République qui devrait normalement réagir. Sa responsabilité et sa complicité sont hélas établies. La question est simple. Est-ce que oui ou non les faits incriminés et évoqués dans l’interpellation sont vrais ? L’utilisation d’armes à feu qui a donné la mort à cinq Béninois dans une manifestation est vraie. La question des arrêtés, n’en-parlons même pas. C’est une réalité vécue par certains d’entre nous. Chacun de nous doit comprendre que non seulement le gouvernement et le Chef de l’Etat banalise notre interpellation, mais qu’ils n’éprouvent aucun regret qu’ils ont fait l’option de perpétuer cette pratique puisque les nouvelles recrues qui se promènent dans le pays disent allègrement ce que eux, ils  n’osent pas dire devant caméras et micros. Ils veulent opposer deux enfants du Nord pour que le Sud prenne le pouvoir. Notre démocratie est en recul. Nous n’allons pas permettre à des gens de détruire ce qu’ils n’ont construit… »

Antoine Kolawolé Idji, vice-président du Madep
« J’avais souhaité lors du débat général sur le vote de l’interpellation que ce soit le Chef de l’Etat lui-même qui vienne ici nous parler, nous rassure. Je vois qu’il a envoyé un de ses ministres comme la Constitution l’y autorise. Mais cela est dommage ! J’ai suivi l’argumentation du ministre. Mais avec toute l’estime que je lui voue, il est passé à côté. Le débat aujourd’hui porte sur l’avenir de notre pays. Il porte sur la question de l’unité nationale. C’est un débat capital. Ce qui se développe aujourd’hui est inacceptable. En janvier dernier lorsque nous préparions les élections communales, à Kétou, nous avions identifié une personnalité pouvant conduire notre liste. Deux mois avant les élections, cette personnalité a été assassinée. Une semaine avant l’élection, dans un autre village, le leader de notre liste pour les élections locales a été assassiné et son corps a été retrouvé dans un puits. Dans la commune de Kétou, il n’y avait que deux listes, la liste Add-Madep et la liste Fcbe. Je ne dirai pas plus. Mais vous voyer ce qui aurait pu arriver…Il y a seulement quelques semaines, lorsque la Cour Suprême nous a obligé à reprendre les élections dans l’arrondissement d’Idigni, le dernier jour de la campagne, à 17 heures, mes camarades et moi nous avons voulu faire un tour dans notre village, des gens nous ont barré la route avec des barricades, on nous a lancé des couteaux, on a failli brûler ma voiture. Je n’invente rien. Tout peut se vérifier. Où allons-nous ? Il faut que le président de la République nous rassure »

Djibril Débourou, député Fcbe
« Le Chef de l’Etat ne peut pas sanctionné le ministre Fagnon parce que la responsabilité de l’Etat n’est pas engagé. Il ne peut par conséquent punir son ministre. Cependant, je dirais aux présidents Yayi Boni et Mathurin Nago que désormais, lorsque j’exprimerai une opinion sur une quelconque question, qu’ils se préparent tous les deux à subir les foudres de certains de mes collègues. Les dérives régionalistes, parlons-en…Nous pouvons écrire l’histoire du régionalisme dans notre pays d’hier à aujourd’hui. Nous sommes dans un débat strictement politicien. Fagnon n’est lié par aucun serment devant la Constitution et c’est cela qui nous confère la latitude de s’exprimer librement sur toutes les questions…L’Assemblée Nationale pour être crédible doit appliquer la loi dans toute sa rigueur. Sur les chaînes de télévision internationale, des députés jettent du discrédit sur notre démocratie en évoquant des faits divers.  Je considère comme fait divers, l’intervention de Fagnon à Dassa le 2 mai 2009. Quel honneur pour le ministre Fagnon et quel déshonneur pour les auteurs de dénigrement ! Le cycle infernal des interpellations aura pour finalité de distraire le gouvernement qui se bat quotidiennement pour lutter contre la pauvreté et l’analphabétisme. Le président de la République doit répondre des questions de gestion de chacun des Directeurs généraux  de nos sociétés d’Etat. Ce serait regrettable ! Ce débat m’a permis de dire à la face du monde que les donneurs de leçons ne sont pas toujours indem de touts reproches dans notre Assemblée Nationale. Aucun politicien honnête ne peut me suspecter d’être régionaliste. Mais j’ai entendu des personnes que je respecte profondément des propos régionalistes que je ne répèterai pas ici aujourd’hui. Par conséquent, je pense que ce débat a été salutaire parce qu’il a permis d’entendre des avis divergents sur une question éminemment grande.  Chacun  le dira par rapport à son propre degré de sincérité. Je crois que le Chef de l’Etat à son déchiffrera les allégations des uns et des autres pour apaiser l’ensemble des citoyens béninois qui ne sont pas du tout convaincus des positions antirégionalistes des politiciens que nous sommes ».

Oba Chabi Denis, Député Fcbe
« Il y a un adage Nago qui dit ceci : le grand arbre qu’est l’Iroko se détruit pendant qu’il est jeune pousse. Si vous le laisser grandir, il vous compliquera la situation. C’est dire aujourd’hui que chez nous au Bénin, personne ne peut accepter la destruction de notre label qu’est la démocratie. Les déclarations du ministre Fagnon le 2 mai 2009 à Dassa peuvent inquiéter, mais en réalité, il y a plus de peur que de mal. Je le dis parce que nous savons tous ici que le meeting de ceux-là qu’on voulait abattre a pu quand même se tenir. Si Fagnon avait les pouvoirs dont il revendiquait, s’il avait la capacité d’interdire quoi que ce soit dans les Collines et plus précisément chez lui à Dassa, c’est que le Colonel Dankoro et son équipe n’allaient pas pouvoir tenir leur meeting.

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